Souvent modèles mais rarement reconnues comme photographes, les femmes durant le XXème siècle sont quasi-absentes des collections photographiques françaises. Elles n’ont pas été repérées par des historiens et conservateurs et entrent souvent de façon anonyme dans les musées. 

Le sujet des femmes photographes, rarement traité, a connu en 2016 grâce à l’exposition au musée d’Orsay « Qui a peur des femmes photographes ? 1839 à 1945 » une mise en lumière inscrivant durablement la contribution des femmes dans l’histoire de la photographie.

Aux origines de la photographie, les femmes ont une pratique à la marge : leurs intentions sont rarement scientifiques ou commerciales. Les femmes photographes, comme Julia Margaret Cameron explorent les possibilités artistiques de la photographie pour donner à voir un monde sensible.

La plupart des femmes photographes ont rencontré des difficultés pour faire reconnaitre leur travail. Les photographies de Sabine Weiss, par exemple, manquèrent longtemps de visibilité par rapport aux images des autres photographes humanistes.

Depuis l’invention de la photographie en 1839, les femmes ont souvent servi de modèles photographiques. Elles sont également nombreuses à travailler dans les ateliers de photographies, ce qui leur a aussi permis d’investir peu à peu la profession de photographes. L’entre-deux-guerres (1918-1939) constitue l’âge d’or de la photographie pour les femmes, elles participent alors pleinement au mouvement d’avant-garde. 

Tina Modotti photographe américaine d’origine, elle a été actrice, modèle et assistante du photographe Edward Weston avant de se consacrer pleinement à la photographie. Elle participe au mouvement de la photographie pure qui vise à rendre une scène aussi réaliste que possible et qui renonce à tout principe de manipulation. Ce mouvement rompt avec les codes de l’époque. Dans les années 1920, Tina Modotti tient son propre studio au Mexique, elle est aussi connue pour son engagement en faveur du parti communiste.

Dora Maar fut pendant longtemps considérée dans l’histoire comme maîtresse et muse du peintre Pablo Picasso . Elle fut pourtant une peintre et une photographe prolifique. Ses travaux s’inscrivent dans le courant surréaliste. Elle réalise des photomontages aux aspects étranges.

La photographe américaine Lee Miller a également été modèle puis photographe. Suite à ses études artistiques, elle s’installe à Paris où elle devient l’assistante et le modèle du photographe Man Ray. Ses premières photos sont fortement inspirées par le surréalisme. Lee Miller devient célèbre pendant la seconde guerre mondiale où elle réalise des reportages sur la vie au front et les camps de concentration.

Cette connaissance mixte des statuts de photographe et de modèle permet aux femmes d'exploiter le medium photographique avec cette double sensibilité. Les images féminines ont longtemps été fabriquées par les hommes et pour les hommes. Inversement, avec la photographie les femmes participent à leurs images.

Dorothea Lange

Dorothea Lange, Two tobacco tenant mothers (related) with part of their children. Wake County, North Carolina, 1939
Library of Congress

 

 

Dès les années 1930, au États-Unis, les femmes investissent le champ documentaire notamment avec les images de Margaret Bourke-White, pionnière du photoreportage ou Dorothea Lange qui, à travers la campagne de la Farm Security Administration (1935-1942), modifie la vision de la société américaine sur ses territoires ruraux et la vie des paysans.

 

 

 

 

Après la Seconde Guerre mondiale, le mouvement de la photographie de rue ou « Street photography » en anglais s’intéresse à photographier les grandes villes, et plus précisément la présence humaine dans ces espaces (rues, parcs, plages, transports en commun).

Ces photos d’individus ne sont pas posées, elles sont prises sur le vif. Ce mouvement rencontre un grand succès aux États-Unis au milieu du XXe siècle. Beaucoup de femmes photographes y participent, elles arpentent les rues des métropoles américaines et réalisent des photos devenues emblématiques dans l’histoire de la photographie.

L’autoportrait est un moyen pour l’artiste de représenter sa place dans la société et ses engagements. Durant le XIXe siècle, on trouve très peu d'autoportraits de femmes. En revanche, au XXème siècle, ce genre devient une obsession, un moyen d'explorer leurs identités et l'image qu'elles renvoient d'elles-mêmes. Les autoportraits permettent aux femmes de questionner leur identité sexuelle. Les photographes Claude Cahun et Florence Henri réalisent de nombreux autoportraits, interrogeant leur féminité.

Dans les années 1960, le mouvement féministe questionne la sexualité, la place de la femme dans la famille, la féminité et les violences conjugales. Certaines photographes se sont emparées de ces sujet. Ce fut le cas de Cindy Sherman qui a effectué durant toute sa carrière des autoportraits dans lesquels elle se met en scène et se travestit. Dans son œuvre, elle adopte une multitude d’identités très diverses. Elle entremêle les sexes, les couleurs de peaux, les âges, pour mettre en avant les rôles, clichés et fonction qui parsèment le corps social et notamment l’identité féminine.

Dans les années 1970, l’artiste française ORLAN interroge les questions liées au corps et défend des positions subversives et innovantes. Ses réflexions et ses performances artistiques sont documentées via des photographies.

L'association AWARE qui travaille à rendre visibles les artistes femmes des XIXe et XXe siècles propose un parcours thématique autour de la question : La photogra­phie, une histoire de femmes ?