Antiquité

Dès la plus haute Antiquité, les grandes civilisations, en Chine, Inde, Égypte, Mésopotamie, Afrique, Amérique précolombienne, développent une littérature. D’abord  orales, ces littératures ont pu, pour certaines, être transmises jusqu’à nous grâce au passage à l’écriture.

Mésopotamie (3000 av. JC)

Épopée de Gilgamesh, composée au 3e millénaire en sumérien puis transcrite sur des tablettes d’argile.
A écouter  :
Gilgamesh, porte d'entrée royale de la littérature épique ?
L'épopée de Gilgamesh lue comme une réflexion sur la condition humaine

Hymnes d’Enheduanna, premier auteur dont le nom soit identifié et première écrivaine connue

Égypte (2000 av. JC)

Le Livre des morts des anciens Égyptiens, écrit en hiéroglyphes sur des papyrus (2e millénaire)

Mais la littérature française et européenne est principalement influencée par la littérature de l’Antiquité gréco-romaine, et par la Bible.
 

Grèce Antique (VIIIe-Ve s. av. JC)

Époque archaïque (VIIIe-VIe s. av. JC)

-    L’Iliade et L’Odyssée, épopées d’Homère, plus anciennes œuvres conservées de la littérature grecque (VIIIe s.) 
-    Poésie d’Hésiode, de Sappho, de Pindare

Époque classique (Ve s. av. JC)

-    Tragédies d’Eschyle, Sophocle et Euripide
-    Comédies d’Aristophane
-    Histoire : Hérodote, Thucydide, Xénophon
-    Philosophie : Platon, Aristote 

Rome Antique (IIIe s. av. JC-IIe s. ap. JC)

Son âge d’or se situe entre le Ier siècle avant JC et le IIe siècle de notre ère. Poètes, historiens, orateurs, philosophes produisent de nombreuses œuvres.
-    Comédies de Plaute et Térence (IIIe-IIe s. av. JC)
-    Discours de Cicéron
-    Histoire : César, Tite-Live, Suétone, Tacite
-    Philosophie : Lucrèce, Sénèque, Marc-Aurèle
-    Premier roman de la littérature antique : le Satyricon de Pétrone, (Ier siècle après JC)
-    Poésie :  épopée de L’Enéide par Virgile , les élégies d’Ovide (L’Art d’aimer, les Métamorphoses) entre le Ier siècle avant et le Ier siècle après JC, satires de Juvénal (IIe s. ap. JC)

Littérature latine chrétienne (IVe-Ves. ap. JC) :

-    Saint Jérôme, traducteur de la Bible en latin (la Vulgate)
-    Saint Augustin, Les Confessions

La Bible

La rédaction de la Bible s’échelonne entre le VIIIe s. avant JC et le Ier s. de notre ère.

Moyen Âge

Le premier texte attesté en langue romane, les Serments de Strasbourg, date de 842. Mais il faut attendre le XIIe siècle pour voir s’épanouir une littérature en langue vulgaire, dans le contexte de l’apogée des cours féodales : poésie et récits généralement composés en vers (chansons de geste, romans courtois).

Chanson de geste (fin XIe - fin XIVe s.)

Épopée nourrie de thèmes féodaux, la chanson de geste conte les hauts faits des grands seigneurs, exaltant la bravoure et l’idéal chevaleresque. D’abord chantée et transmise oralement, elle est l’œuvre d’auteurs anonymes. La plus connue est la Chanson de Roland (v. 1070), qui relate les exploits de Charlemagne.

Littérature courtoise  (XIIe-XIIIe s.)

Poésie des troubadours

La poésie des troubadours est la première poésie composée en langue vulgaire. Elle chante l’amour courtois, la « fin’amor ». Les poètes de langue d’oc comptent Guillaume IX d’Aquitaine ou encore Marie de France, qui compose des Lais. Les trouvères, poètes de langue d’oïl, s’illustrent avec Thibaut de Champagne.

Roman courtois

À partir de la seconde moitié du XIIe siècle, le roman courtois supplante peu à peu les chansons de geste. Il recourt à la « matière de Bretagne », mélange de merveilleux celtique et de valeurs courtoises. La légende arthurienne est le premier mythe breton exploité. S’y adjoignent bientôt la légende de Tristan et Iseult et celle de Lancelot, comme chez Chrétien de Troyes.

Satire (XIIe-XIIIe s.)

Issue de la bourgeoisie, une littérature satirique se développe en réaction contre la littérature courtoise, qu’elle moque et parodie :

  • les fabliaux, textes très populaires, volontiers grivois et généralement anonymes, mais dont certains auteurs, comme Rutebeuf, sont restés célèbres ;
  • le Roman de Renart (XIIe-XIIIe s.) découvrir les manuscrits du Roman de Renart, ses sources d'inspiration et ses réécritures
  • le Roman de la Rose, de Guillaume de Lorris et Jean de Meung (XIIIe s.), écrit en langue d’oïl, récit le plus lu de toute la littérature médiévale, qui conjugue éloge puis critique de l’amour courtois et traité didactique de morale, savoir et religion.

Récit historique (XIIIe-XIVe s.)

L’histoire devient un genre à part entière, se détachant de la chanson de geste. Avec les Chroniques de Geoffroi de Villehardouin, de Philippe de Joinville (sur les Croisades) et de Jean Froissart (Guerre de Cent ans), puis les Mémoires de Philippe de Commynes (règnes de Louis XI et Charles VIII), le récit des événements et l’analyse priment sur la légende.

Renouveau des formes (XIVe-XVe s.)

Poésie

À la poésie courtoise succèdent des formes nouvelles, comme le virelais, le rondeau, la ballade, où s’illustrent le lyrisme personnel de Christine de Pisan ou Charles d’Orléans et la verve truculente et satirique de François Villon (Ballade des pendus).

Au XVe s., les Grands Rhétoriqueurs, comme Jean Marot, privilégient la virtuosité formelle.

Théâtre

Le théâtre se détache peu à peu du sacré, le drame liturgique laissant place aux mystères, vastes représentations à thème religieux ou moral, et à la farce, œuvre profane, ancêtre de la comédie moderne (Farce de Maistre Pathelin, v. 1465).

À l’étranger :

Temps modernes

Dans le sillage de la Renaissance italienne, débutée au XVe siècle, et de la Réforme, la littérature du XVIe siècle rompt avec l’esthétique et les croyances médiévales. Le courant humaniste défend liberté de jugement, esprit critique et appétit de connaissances. Il s’appuie sur un retour aux sources et aux modèles de l’Antiquité gréco-romaine et des premiers écrits chrétiens, et rejette la glose médiévale. L’essor de l’imprimerie permet une diffusion rapide des nouvelles idées.

Érudition

Les érudits lettrés, à l’instar de Guillaume Budé ou Jacques Amyot, proposent de nouvelles traductions des auteurs grecs et latins. Jacques Lefèvre d’Étaples traduit la Bible en français en 1530. Au  milieu du siècle, L’Institution de la Religion chrétienne de Jean Calvin introduit les idées de la Réforme en France (1536-1559).

François Rabelais

Parangon de l’érudit humaniste, François Rabelais fait dans ses célèbres récits Pantagruel (1532) et Gargantua (1534-1535) une virulente dénonciation des institutions de son temps, de l’éducation, de la guerre et de l’obscurantisme religieux. Outre leur truculence, ses textes sont le lieu d’une grande inventivité verbale.

Renouveau des formes poétiques

Clément Marot

Après Pétrarque en Italie au XVe s., Clément Marot introduit le sonnet italien en France, popularisé ensuite par la Pléiade. Il invente également le jeu littéraire du blason.

L’école lyonnaise

Le groupe dit de « l’école lyonnaise » se forme autour de Maurice Scève. Il compte notamment Pernette du Guillet et Louise Labé, la plus grande poétesse de la Renaissance, qui défend des conceptions féministes.

La Pléiade

La Pléiade, groupe de poètes réunis à Paris autour de  Pierre de Ronsard, le « Prince des poètes », constitue le principal foyer d’innovation. Son manifeste : Défense et illustration de la langue française (1549), signé Joachim du Bellay, encourage à créer une véritable poésie française originale, exploitant la richesse de la langue française et le recours aux modèles antiques.

Michel de Montaigne

La seconde partie du siècle, assombrie par les troubles religieux, rompt avec l’enthousiasme grisant du premier humanisme. Les Essais de Michel de Montaigne (1580), méditation désabusée sur le moi et le monde, reflètent cette inflexion. L’appétit de savoir s’y trouve pondéré par la conscience de l’instabilité du monde et du relativisme des connaissances.

À l’étranger : Érasme, Éloge de la folie (1509), Tomas More, L’Utopie (1516),  Machiavel, Le Prince (1532), Baldassare Castiglione, Le Livre du Courtisan (1528)

 

XVIIe siècle 

L’âge baroque (première moitié du siècle)

Reflet de l’instabilité politique et sociale, la littérature de l’âge baroque se caractérise par l’irrégularité, le mouvement, l’excès, la fantaisie, et un style marqué par l’abondance des figures rhétoriques et particulièrement des métaphores.

Préciosité

Fondée sur une codification et un raffinement extrêmes de la langue et des rapports amoureux, la préciosité s’épanouit au sein des salons aristocratiques parisiens, comme celui de Madeleine de Scudéry à l’Hôtel Rambouillet. L’Astrée, roman pastoral d’Honoré d’Urfé (1607-1627) et best-seller de l’époque, illustre la vogue des romans précieux.

Littérature burlesque et satirique

À rebours de la sophistication précieuse, le genre nouveau du « roman comique » - également titre du chef-d’œuvre de Paul Scarron (1651-1657) - est alors très fécond. Inspiré des romans picaresques espagnols et du Don Quichotte de Cervantès, il propose une satire de la société dans un registre burlesque et satirique.

L’esprit critique se manifeste également dans la veine galante et libertine, aux thèmes volontiers fantastiques, comme chez Théophile de Viau ou Savinien Cyrano de Bergerac, dont le diptyque romanesque — Les États et empires de la lune et du soleil — est considéré comme un des premiers romans de science-fiction.

Tragi-comédie

Tragédie aux thèmes héroïques ou spectaculaires, non encore assujettie à des règles, et au dénouement heureux, la tragi-comédie s’impose à partir des années 1630 avec Pierre Corneille. La querelle du Cid en 1637 le conduit à adopter ensuite les principes de la tragédie régulière.

À l’étranger : William Shakespeare

 

L’âge classique (seconde moitié du siècle)

Amorcé dans les années 1630 avec la création par Richelieu de l’Académie française (1635) dont le Dictionnaire doit fixer le « bon usage », le classicisme est associé au règne personnel de Louis XIV, à partir de 1661. Il se caractérise par la recherche du « bon goût », un retour aux modèles de l’Antiquité gréco-latine, une visée moralisatrice, et s’appuie sur un mouvement de codification de la langue et des formes littéraires, qui répond à la volonté centralisatrice du pouvoir. L’Art poétique de Nicolas Boileau (1674) en fait la synthèse (clarté, netteté, évidence logique).

Au théâtre : tragédie régulière et grande comédie

Définie par un strict respect des trois unités de temps, lieu et action, le recours aux thèmes des tragiques anciens et de la Bible, et par son intention édifiante – « plaire et toucher » - la tragédie classique vit son apogée dans les années 1660-1670 avec Jean Racine (Andromaque, Britannicus, Bérénice, Phèdre).

Au même moment, la comédie conquiert ses lettres de noblesse avec Molière, qui dénonce faits de société et vices du temps, cherchant à corriger les mœurs par le rire, en créant des « types » puissants dont la portée transcende l’époque (Dom Juan, Tartuffe, L’Avare, Le Misanthrope).

Littérature morale et religieuse

Issu du jansénisme, mouvement né dans les années 1640 au sein de l’abbaye de Port-Royal et dont Blaise Pascal est le principal représentant dans les lettres, le moralisme irrigue la plupart des œuvres de l’époque classique, suscitant de nouvelles formes littéraires.

À noter : le goût pour le trait d’esprit et la peinture des mœurs du temps se retrouve dans les célèbres Lettres de la Marquise de Sévigné, qui ne seront publiées qu’au XVIIIe siècle, devenant vite célèbres.

La Querelle des Anciens et des modernes et la fin du classicisme

Débutée vers 1670, la Querelle des Anciens et des Modernes, opposant les défenseurs des Modernes, comme Fontenelle et Perrault, et les tenants des Anciens, comme Racine, Boileau ou La Bruyère, sonne le glas des canons classiques.

 

XVIIIe siècle 

Les Lumières

Un temps nouveau s’ouvre avec la mort de Louis XIV en 1715. Essentiellement aristocratique à l’âge classique, la littérature du XVIIIe siècle reflète la montée en force de la bourgeoisie et ses nouvelles aspirations à des valeurs plus positives : progrès, bonheur, égalité entre les hommes, tolérance, via la diffusion à tous du savoir. La littérature du « siècle des Lumières » est d’abord une littérature d’idées.

Réflexion sur l’ordre politique

Les penseurs des Lumières remettent en cause la notion d’absolutisme. Inspirés par les exemples étrangers, notamment l’Angleterre, ils prônent des régimes plus modérés, plus aptes à garantir liberté et bonheur à l’individu, concept qui émerge alors (Charles de Montesquieu, De l’esprit des lois (1748),  Voltaire, Lettres philosophiques, 1737), (Jean-Jacques Rousseau, Du Contrat social, 1762)

Critique des mœurs et de la religion

Plus généralement, c’est toute la société et ses fondements moraux qui sont remis en cause. L’heure est aux voyages et à la découverte de nouvelles formes de civilisations. La littérature fait l’éloge du « bon sauvage » et de l’état de nature pour interroger les valeurs de l’Occident (Charles de Montesquieu, Lettres persanes (1721), Diderot, Supplément au Voyage de Bougainville (1796), Jean-Jacques Rousseau, Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes (1755), Émile ou De l’éducation (1762)).

Sur le plan religieux, l’obscurantisme et la mainmise de l’Église sur la société sont remis en cause, au profit d’une intériorisation de la foi, ou même d’un athéisme revendiqué, et de la quête du bonheur dans le présent. Les romans philosophiques du temps, comme ceux de Voltaire ou Denis Diderot, s’en font l’écho.

À l’étranger : Jonathan Swift, Voyages de Gulliver (1726)

Droits des femmes

En 1791, pendant la Révolution française, Olympe de Gouges publie La Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne.

L’Encyclopédie

Les idées des Lumières sont rassemblées dans l’immense Encyclopédie de Diderot et d’Alembert (1751-1772), « tableau général des efforts de l’esprit humain dans tous les genres et dans tous les siècles », destiné à servir le progrès et le triomphe de la raison.

Roman épistolaire

Le roman par lettres est caractéristique du XVIIIe siècle, dans une production romanesque par ailleurs foisonnante. Julie ou la Nouvelle Héloïse de Jean-Jacques Rousseau (1761), énorme succès, en illustre le versant idéaliste et sentimental. Les Liaisons dangereuses de Choderlos de Laclos (1782) en sont, à l’inverse, le versant libertin et cruel.

Comédie et drame bourgeois

Délaissée pendant les dernières années du règne de Louis XIV, la comédie renaît sous la plume de Marivaux, avec pour thème essentiel l’amour (Le Jeu de l’amour et du hasard, 1730), puis celle de Pierre-Augustin Caron de Beaumarchais, dans une veine davantage sociale et satirique (Le Barbier de Séville (1775), Le Mariage de Figaro (1784)).

À la tragédie classique se substitue le drame bourgeois, « tragédie domestique et bourgeoise en prose » (Diderot).

Le cœur

Siècle de la raison, le XIXe siècle est aussi celui du sentiment. Jean-Jacques Rousseau, dans ses Rêveries du promeneur solitaire et ses Confessions, se fait le promoteur de cette nouvelle sensibilité, marquée par la mélancolie, les amours contrariées, le sentiment de solitude et d’incompréhension, la recherche d’harmonie entre l’âme et le paysage, qui préfigure le romantisme.

Deux grands romans de l’amour malheureux marquent le siècle : Manon Lescaut, de l’Abbé Prévost (1731) et Paul et Virginie, de Jacques-Henri Bernardin de Saint-Pierre (1788).

Radicalement opposée est la perversion incarnée par le marquis de Sade, inclassable auteur de cette fin de siècle.

À l’étranger : Johann Wolfgang von Goethe et le mouvement littéraire Sturm und Drang (tempête et passion).

XIXe siècle

Romantisme (1800-1850)

Voix d’une génération contrainte d’abandonner ses rêves de changement politique, le romantisme domine la littérature de toute la première moitié du XIXe siècle. Repli sur soi, mélancolie expriment le malaise de l’individu dans la société. Le romantisme renouvelle profondément la sensibilité littéraire, favorisant le développement d’une écriture d’inspiration lyrique, historique et psychologique.

Héroïnes romantiques
Le romantisme 3 minutes

François-René de Chateaubriand

Avec son roman René (1802), François-René de Chateaubriand crée le type du héros romantique, moi souffrant emporté dans la tourmente de l’histoire et des passions.

Mme de Staël

Né en Allemagne avec Goethe vers 1770, avec Shelley, Keats et Byron en Angleterre, le romantisme est introduit en France par Mme De Staël et son ouvrage De l’Allemagne (1813), qui définit le terme par opposition au classicisme.

Le lyrisme poétique

Le romantisme s’incarne de manière privilégiée dans la poésie, lieu d’expression d’un sujet solitaire, incompris, trouvant dans la nature un refuge pour les épanchements de son âme. Ainsi chez Alphonse de Lamartine, Alfred de Vigny, Alfred de Musset (La Confession d’un enfant du siècle, 1836), Marceline Desbordes-Valmore, Louise Colet.  

Victor Hugo

Son souffle puissant domine le siècle. Chez Victor Hugo, la sensibilité se double d’une réflexion sur le destin, personnel et collectif (La Légende des siècles), et d’une croyance profonde dans le pouvoir du verbe et la mission prophétique du poète.

Victor Hugo, l'homme-océan
Les Contemplations (1856)

Le drame romantique

S’inspirant du genre populaire du mélodrame et du modèle shakespearien (Stendhal, Racine et Shakespeare, 1823), le drame romantique se libère des contraintes de la tragédie classique, prônant un théâtre plus proche du réel. Théorisé par Victor Hugo dans sa préface à Cromwell (1827), il triomphe en 1830 après la célèbre «  bataille d’Hernani ». Il s’illustre notamment chez Alfred de Musset (On ne badine pas avec l’amour (1834), Lorenzaccio (1835)).

 

Réalisme (1830-1870) et naturalisme (1870-1890)

L’époque romantique voit l’épanouissement du genre romanesque, aux thèmes en accord avec la sensibilité du temps : roman sentimental (George Sand) ; roman historique et fantastique (Alexandre Dumas, Les Trois Mousquetaires ; Victor Hugo, Notre-Dame de Paris, Les Misérables ; Prosper Mérimée ; Gérard de Nerval ; à l’étranger : Edgar Poe). Mais c’est dans sa veine sociale qu’il est le plus fécond, et ses œuvres réunies sous le terme générique de réalisme, car elles entendent peindre fidèlement la société et l’âme humaine.

Stendhal

Pour Stendhal, le roman est « un miroir que l’on promène le long d’un chemin », il dévoile la vérité des êtres et du monde (Le Rouge et le noir (1831), La Chartreuse de Parme (1839)).

Honoré de Balzac

S’appuyant sur les avancées des sciences naturelles et sociales, la Comédie humaine d’Honoré de Balzac, aux plus de deux mille personnages, entend « faire concurrence à l’état-civil ».

Gustave Flaubert

Très documentés, les romans de Flaubert visent à transformer la petitesse des choses et l’échec de ses héros en œuvre d’art, par la force du style (Madame Bovary (1857), L’Éducation sentimentale (1869)).

Bicentenaire de Flaubert en 2021

Madame Bovary

Émile Zola

Inventeur du naturalisme, Émile Zola applique au roman les principes des sciences expérimentales. Les Rougon-Macquart décrivent l’ « histoire naturelle et sociale » de son temps, à travers le destin d’une famille aux prises avec son hérédité et son milieu.

Auteurs d’un célèbre Journal et romanciers d’inspiration naturaliste, les frères Edmond et Jules Goncourt étaient admirés par Zola.

L'Assommoir d'Émile Zola

Au Bonheur des dames d'Émile Zola

La Fortune des Rougon

Guy de Maupassant

Oscillant entre réalisme et fantastique, Guy de Maupassant fut un auteur prolixe de contes, nouvelles et romans, parmi lesquels Boule de Suif et Le Horla.

 

Littérature populaire

L’essor considérable de la production éditoriale au XIXe siècle s’accompagne d’un élargissement du lectorat, qui profite aux littératures populaires comme à la littérature pour enfant. Jules Verne est le principal représentant de cette veine. Ses « romans scientifiques », précurseurs de la littérature de science-fiction, influenceront par exemple les romans d’anticipation de H.G. Wells, quelques dizaines d’années plus tard (La Machine à explorer le Temps, 1895)

 

Modernité et symbolisme en poésie

Charles Baudelaire (1821-1867) et la modernité

Au carrefour des tendances de son temps, Charles Baudelaire (Les Fleurs du mal, 1857) invente une modernité qui allie le lyrisme romantique et la beauté formelle du Parnasse. Sa théorie des correspondances annonce par ailleurs Rimbaud et le symbolisme.

Le Parnasse (1866-1876)

L'école du Parnasse marque la rupture avec le romantisme, dont il condamne le lyrisme excessif. Emmenés par Théophile Gautier, qui théorise ce mouvement de « l’art pour l’art »,  des poètes comme Charles Leconte de Lisle et José-Maria de Heredia défendent une poésie visant la pure beauté formelle.

Symbolisme (1870-1890) : Paul Verlaine, Arthur Rimbaud, Stéphane Mallarmé

Le symbolisme entend renouer avec la valeur suggestive et interprétative de la poésie, chargée de déchiffrer les vérités cachées du monde. Complexe, sa poésie peut évoluer vers l’hermétisme. Le terme regroupe de manière assez lâche des poètes aux styles très personnels, qui ont en commun le travail sur le langage et les images.

  • Paul Verlaine (1844-1896) est le poète de la musicalité, de la suggestion impressionniste : « De la musique avant toute chose ».
  • Arthur Rimbaud (1854-1891) : « alchimiste du verbe », le poète se fait « voyant » par « un long, immense et raisonné dérèglement de tous les sens », pour faire jaillir la vérité du monde et « changer la vie ». Il écrit en 1871 le long poème Le Bateau ivre.
  • Stéphane Mallarmé (1842-1898) : son exigence verbale pousse au paroxysme les principes du symbolisme, élaborant un langage neuf, où ne subsiste que la force incantatoire du mot.
Lautréamont, Les Chants de Maldoror

Contemporain de Rimbaud et météore littéraire comme lui, Isidore Ducasse, comte de Lautréamont, au style unique, partage avec lui un même sens de la révolte. Son style aux images détonantes sera une référence pour les surréalistes.

 

Littérature fin de siècle et décadence

Des Esseintes, personnage principal du roman À Rebours de  Joris-Karl Huysmans, apparaît comme l’archétype du héros décadent, chez qui goût du morbide, complaisance, insatisfaction et écœurement font culminer la figure du dandy apparue dans le siècle, notamment avec Baudelaire.

La voix la plus singulière de cette fin de siècle est celle explosive d’Alfred Jarry, auteur d’Ubu Roi, farce grotesque et cruelle, et précurseur du surréalisme et du théâtre de l’absurde.

À l’étranger : Oscar Wilde, Le Portrait de Dorian Gray (1890)

XXème

Ruptures (1900-1920)

Marcel Proust et le roman moderne

Véritable révolution dans le domaine du roman, À la Recherche du temps perdu (1913-1927) de Marcel Proust, propose une rupture radicale avec les formes comme avec les thèmes habituels du récit : inspiration autobiographique, transformation de la structure narrative et introduction du point de vue de l’auteur/narrateur, … Plus généralement, le roman interroge sa relation au « vrai », évolution illustrée également par l’œuvre d’André Gide, qui culmine en 1926 avec Les Faux-monnayeurs et sa structure « mise en abyme ».

À l’étranger : Virginia Woolf, James Joyce, Franz Kafka

Apollinaire et l’« esprit nouveau » en poésie

En poésie, tandis que Paul Valéry poursuit le travail formel mallarméen, que s’épanouit une poésie d’inspiration catholique avec Charles Péguy et Paul Claudel, également dramaturge, et une autre teintée d’exotisme (Saint-John Perse, Victor Segalen) d’autres explorent des formes et contenus nouveaux.

 La poésie se libère du carcan des formes fixes et du vers régulier pour épouser des formes personnelles avec Blaise Cendrars, le poète-voyageur (La Prose du Transsibérien et de la petite Jehanne de France, 1913), Max Jacob et sa poésie cubiste (Le Cornet à dés, 1917), ou Pierre Reverdy et sa poétique centrée sur l’image (Poèmes en prose, 1915).

Mais c’est Guillaume Apollinaire qui opère la mutation la plus décisive, en prônant le vers libre, l’abolition de la ponctuation, la beauté du monde moderne et en inventant avec le calligramme la poésie figurative. Son recueil Alcools (1913) est considéré comme le manifeste de la poésie moderne.

Entre-deux-guerres

L’horreur provoquée par la Première Guerre mondiale, et rapidement la perception de la montée de nouveaux périls vont de pair avec une remise en question radicale des modèles culturels, dont le surréalisme est le symbole.

Dadaïsme et surréalisme

Né pendant la guerre sous l’égide du poète Tristan Tzara, le mouvement Dada entend faire table rase du monde ancien en créant un langage nouveau. Il rencontre les préoccupations d’un groupe de poètes parisiens réunis autour d’André Breton, Louis Aragon, Philippe Soupault puis Paul Éluard. En 1924, André Breton publie le Manifeste du surréalisme, qui appelle l’art à puiser dans les ressources de l’inconscient via l’automatisme, pour se libérer ainsi des contraintes de la morale et de la société. Le surréalisme bouleverse durablement la création au XXe siècle.

Nombreux sont les écrivains et poètes qui se rapprochent pour un temps au moins du surréalisme, comme Benjamin Péret, Robert Desnos, René Char, Jacques Prévert ou encore Antonin Artaud.

Liens
En quoi les avant-gardes poétiques du XX° siècle anticipent-elles la littérature numérique ?
Nadja d'André Breton

Colette

Les romans de Colette témoignent d’une certaine libération des femmes et de leur présence accrue dans la société et sur la scène littéraire et artistique, caractéristiques des années folles.

Militantisme, nihilisme

Le roman de l’entre-deux-guerres se fait volontiers militant, questionnant la morale, la religion (François Mauriac, Georges Bernanos, Marcel Jouhandeau, Henry de Montherlant), la politique (André Gide ou André Malraux contre le colonialisme, au moment où émergent par ailleurs la littérature francophone, africaine notamment, et le concept de « négritude » (Aimé Césaire, Léopold Sédar Senghor), pacifisme de Jean Giono).

Louis-Ferdinand Céline

La parution en 1932 de Voyage au bout de la nuit est une secousse dans le monde des lettres, par l’originalité et l’audace du style de Louis-Ferdinand Céline, empreint d’une syntaxe et de formules issues de la langue parlée. Le nihilisme de l’auteur est également typique de ces années de perte de l’insouciance et d’interrogation sur la fonction assignée à la littérature. 

Résistance et clandestinité

Pendant la Seconde Guerre mondiale, le monde des lettres se scinde entre écrivains collaborationnistes et résistants. Parmi ces derniers, le nom demeuré le plus célèbre est celui de Vercors, fondateur des Éditions de Minuit clandestines et auteur du Silence de la mer (1942).

Engagement, existentialisme et absurde (1945-1960)

Au sortir de la guerre, la philosophie existentialiste, théorisée par Jean-Paul Sartre (L’être et le néant, 1943), connaît un succès particulier : seule compte la force des actes et l’engagement dans la vie de la cité. L’écrivain s’interroge sur sa mission et l’acte d’écrire est mis au service de thèses et idéologies. C’est la naissance de la figure de l’intellectuel engagé.

Simone de Beauvoir, compagne de Sartre, s’illustre par sa réflexion sur la condition féminine (Le Deuxième sexe, 1949).

La dimension absurde de la condition humaine et la nécessité de l’engagement sont au cœur de l’œuvre d’Albert Camus, prix Nobel de littérature 1957 (L’Étranger (1942), La Peste (1947), L’Homme révolté (1951)).

Sur les planches, le théâtre de l’absurde, représenté principalement par Samuel Beckett et Eugène Ionesco, développe un nouveau langage dramatique.

Nouveau roman et expérimentations (1950-1970)

Né dans les années 1950 autour d’auteurs publiés par les Éditions de Minuit, le « nouveau roman » achève le processus de déconstruction du roman réaliste, en niant les notions de personnage, d’intrigue, de chronologie, pour leur substituer une simple transcription du monde. Regroupant des auteurs comme Michel Butor, Nathalie Sarraute, Marguerite Duras, Claude Simon, prix Nobel de littérature 1985, il est théorisé en 1963 par Alain Robbe-Grillet dans Pour un nouveau roman.

Contemporain du nouveau roman, l’Oulipo (1960) est un autre exemple de cette littérature de « laboratoire ». Le récit y est soumis à des contraintes arbitraires, dans un but à la fois ludique et expérimental. Ainsi chez Raymond Queneau ou Georges Perec.

Science-fiction et roman policier

Alors que plusieurs chefs-d’œuvre de la science-fiction sont publiés à l’étranger pendant cette première moitié du XXe siècle (Aldous Huxley, Le Meilleur des mondes (1932), George Orwell, 1984 (1949), Ray Bradbury, Fahrenheit 451 (1953)), elle est représentée en France par le précurseur René Barjavel (Ravage, 1943).

JRR Tolkien, dont le Le Seigneur des anneaux (1954-1955) est un immense succès, est considéré comme le père de la fantasy, dont Harry Potter est la plus célèbre variante contemporaine.

Parallèlement se produit un essor du roman policier, avec des figures comme le belge Georges Simenon, créateur du commissaire Maigret, ou les Français Gaston Leroux (Rouletabille), Léo Malet (Nestor Burma), Frédéric Dard (San Antonio), Jean-Patrick Manchette, inventeur du néo-polar.

 

Voix personnelles

En marge des problématiques dominantes, des voix singulières ont marqué le XXe siècle littéraire :

https://www.lumni.fr/article/francoise-sagan-romanciere-a-contre-courant

XXIème

La littérature du XXIe siècle prend réellement son envol dans les années 1980, tant cette décennie marque un changement de dynamique. L’industrialisation de l’édition induit un essor considérable de la production. Parallèlement à la multiplication des auteurs disparaît la notion d’école, au profit d’une floraison de styles personnels et d’expérimentations. L’engagement disparaît au bénéfice de l’intime et de l’anecdotique.

La mondialisation favorise l’essor de genres dits populaires, comme le polar ou la science-fiction, tandis que la littérature jeunesse connaît un envol sans précédent.

Dans ce paysage littéraire pléthorique, quelques tendances se dégagent néanmoins.

Minimalisme

Toute une génération d’écrivains, marquée par le Nouveau Roman et rassemblée principalement sous la bannière des Éditions de Minuit, se caractérise par une écriture de type minimaliste. Parmi eux, Jean Echenoz (Je m'en vais, Prix Goncourt 1999), Jean-Philippe Toussaint, Laurent Mauvignier, Éric Chevillard, Tanguy Viel.

Exaltation des bonheurs simples, poésie et minimalisme du quotidien sont une autre tendance, présente chez Pierre Michon, Christian Bobin ou Philippe Delerm, qui privilégient les formes brèves, dans un style proche de la prose poétique.

L’autofiction ou « roman personnel » 

Inventée en 1977 par Serge Doubrovsky, l’autofiction mêle autobiographie et récit fictionnel. Colette, Jules Renard, Violette Leduc, Michel Leiris (L’Âge d’homme), en sont les lointains précurseurs. Parmi les auteurs contemporains s’y rattachent par exemple, pour certains de leurs titres au moins, Marguerite Duras (L’Amant), Christine Angot, Hervé Guibert, Amélie Nothomb, Edouard Louis, Delphine de Vigan.

Par certains aspects de son œuvre, nourrie d’événements marquants de sa vie comme de ses lectures, les livres de Pascal Quignard (Grand Prix du roman de l’Académie française 2000, Prix Goncourt 2002) peuvent également être rattachés à la pratique de l’autofiction.

 « L’autosociobiographie » d’Annie Ernaux

Annie Ernaux, prix Nobel de littérature 2022, invente le terme d’ « autosociobiographie » pour qualifier son œuvre, où les souvenirs et expériences personnels s’inscrivent plus globalement dans le contexte social, culturel et politique.

Mémoire et société

Si la figure de l’écrivain engagé disparaît de l’horizon littéraire, une part non négligeable des auteurs contemporains fonde sa réflexion sur l’analyse du siècle passé ou de la société actuelle.

  • Patrick Modiano, prix Nobel de littérature 2014, est récompensé pour son œuvre qui, sous une forme d’autofiction, ressuscite la mémoire de Paris sous l’Occupation.
  • Jean-Marie-Gustave Le Clézio, prix Nobel de littérature 2008, influencé par son expérience personnelle de voyageur et sa connaissance des cultures amérindiennes, propose dans des romans teintés d’onirisme une remise en cause de la culture occidentale (Désert, 1980).
  • Critique du monde occidental, de sa vitesse excessive, de la futilité de ses valeurs et de son culte de l’éphémère, se lisent chez Milan Kundera (L’Insoutenable légèreté de l’être, 1984).
  • Chez Michel Houellebecq, la satire acerbe de la société contemporaine tend au nihilisme (Les Particules élémentaires, 1998).

Genres populaires, polar et best-sellers internationaux

La littérature pour la  jeunesse, comme la bande dessinée, et ses variantes plus récentes le roman graphique (Art Spiegelman, Maus (1980-1991, Prix Pulitzer 1992), Marjane Satrapi, Persepolis (2000-2003)), ou le manga, qui s’implante avec un énorme succès en France à partir des années 1990 (Akira), sont parmi les productions les plus abondantes.

Personnages de la littérature jeunesse
Roal Dahl

Les best-sellers se comptent en nombre parmi les genres dits populaires, dont de nouvelles formes apparaissent au XXIe siècle : romance érotique (Fifty Shades of Grey, auto-publié en 2011), sorte de continuation contemporaine de la collection Harlequin implantée en France dans les années 1950, chick-lit, feel-good books, fanfictions…

Le roman policier confirme sa place en France (Fred Vargas, Didier Daeninckx). À la suite du Nom de la rose d’Umberto Eco, nombre de thrillers, majoritairement d’auteurs anglo-saxons (Harlan Coben, Stephen King, Michael Connelly, Mary Higgins Clark, Dan Brown (Da Vinci Code), mais aussi d’auteurs d’Europe du Nord (Arnaldur Indriðason, Stieg Larsson, Camilla Läckberg …) sont des succès mondiaux.

Autrices

Amorcée dans la seconde moitié du XXe siècle, la montée en force des femmes écrivains se poursuit sans discontinuer. Nombreuses sont les autrices désormais présentes sur la scène littéraire, médiatique, récompensées par des prix littéraires, présentes dans les études universitaires ou parmi les succès de librairie, comme Yasmina Reza (Prix Renaudot 2016), Lydie Salvayre (Prix Goncourt 2014), Marie N’Diaye (Prix Fémina 2001), Maylis de Kerangal, Agnès Desarthe, Tatiana de Rosnay, auteur français le plus lu en Europe, Cécile Coulon, Leïla Slimani, Nancy Houston…

Francophonie

Dans un même élan, la reconnaissance et la visibilité des auteurs francophones marquent la fin du XXe siècle comme le XXIe. Parmi les plus connus : le Franco-marocain Tahar Ben Jelloun (Prix Goncourt 1987), le Martiniquais Patrick Chamoiseau (Prix Goncourt 1992), le Franco-libanais Amin Maalouf (Prix Goncourt 1993, élu à l’Académie française en 2011, l’Ivoirien Amadou Kourouma, l’Algérienne Assja Djebar, première femme nord-africaine à être élue à l’Académie française en 2005, l’Haïtienne Yanick Lahens (Prix Fémina 2014), le Franco-Algérien Kamel Daoud, la Guadeloupéenne Maryse Condé.

 

Auteur : Bérénice Stoll, conservatrice à la Réserve des livres rares de la Bibliothèque nationale de France