Arts plastiques (après 1960)

Les années 60 - 70 : une nouvelle vague d'avant-gardes

De grands bouleversements agitent les pratiques artistiques à partir des années 60. Parachevant la déconstruction des conventions académiques entamée par les avant-gardes du début du XXe siècle, les artistes redéfinissent leur travail et ouvrent des voies inconnues qui sont encore explorées actuellement. Le traditionnel cloisonnement des disciplines par médium (peinture, sculpture, dessin...) est fondamentalement remise en cause. La transdisciplinarité est à l’honneur, les artistes opérant des croisements avec la danse, la musique, l'architecture, la philosophie, la sociologie... L'art s'ouvre à de nouvelles zones géographiques jusqu'alors négligées.

En écho aux avant-gardes du début du XXe siècle, une multitude de mouvements apparaissent, chacun engagé dans une re-définition de l'art le subordonnant parfois à d’autres domaines.

Quelques mouvements

Fluxus
A partir de 1963, s'organise un mouvement international et pluridisciplinaire qui utilise l'art pour montrer la beauté de la vie. Créé par Georges Maciunas, un designer d’origine lithuanienne vivant à New York, il rassemble des personnalités à la limite du non-art : Robert Filliou, un ancien économiste, Nam June Paik, musicien coréen pionnier de l'art vidéo et des nouvelles technologies, Georges Brecht, un chimiste qui se lance dans la création de "event", des micro-scénarios à réaliser anonymement.

Arte povera
Ce mouvement d’avant-garde italien, s’oppose à un art « riche » qui obéit à la logique consumériste. Il entend revenir à une création militante inspirée par la simplicité de la nature.

Ex : Mario MerzIgloo Giap, 1968. 

Land art
Né aux Etats-Unis, ce mouvement consiste à créer des œuvres qui se fondent dans la nature, dans des lieux parfois sauvages, pouvant provoquer jusqu’à la disparation des traces de l'intervention elle-même.

Ex : Richard LongWhite rock line, 1990.

Art conceptuel
Ce mouvement redéfinit l'art comme une activité qui redéfinit l'art. Il n’y a plus d’œuvres, seulement des projets, des réflexions et des textes.

Ex : exposition de l’artiste conceptuel, Lawrence Wiener, au Whitney Museum à New-York (USA).

Grâce à ces avant-gardes, de nouvelles formes d'art sont inventées

Le happening
Théorisé et mis en œuvre par l'artiste américain Allan Kaprow à la fin des années 50, il s'agit d'actions souvent absurdes, initiées pour vivre une expérience collective où le public est convié.

Ex : Allan Kaprow et l’art comme expérience.

La performance
Forme d’art qui privilégie le processus par rapport au résultat et se déroule dans le temps. La performance rapproche les arts plastiques du théâtre ou de la danse, mais n’est pas forcément réalisée en public.

Ex : Marina Abramovic et UlayBreath in, Breath out, 1976.

La vidéo
Pratiquée par des artistes pionniers dans les années 60 et 70, tels que Nam June Paik, Bruce NaumanVito Acconci, Gary Hill, elle est le lieu d’une réflexion sur l’image en lien avec la performance et l’installation.

Ex : Gary Hill, Air Raid, 1974.

L'installation
C’est une forme hybride qui articule toute les autres formes d’art, de la vidéo à la sculpture en passant par le dessin ou la photo, et permet d’expérimenter des unités d’espaces-temps singulières.

Ex : Dan GrahamPresent Continuous Past, 1974.

Les livres et les revues
Travaillant sur le rapport texte-image autant que sur la question de la diffusion des œuvres,  les artistes créent des publications qui sont des réalisations artistiques à part entière.

Ex : Edward Ruscha, Every Building on the Sunset Strip, 1966.

Les années 80 - 90 : la redécouverte du monde

Marquées par la fin de la guerre froide, ces années voient affluer dans le milieu artistique des références hétérogènes, historiques, populaires, extra européennes, sans distinction de valeurs, syncrétisme qu’on a pu qualifier de postmodernisme.

Début des années 80 : retour à des pratiques plus classiques

Retour à la peinture et à une revalorisation du geste pictural

Les peintres se réfèrent aussi bien à la tradition qu’à la culture populaire, ancienne ou contemporaine. On peut penser à Robert Combas en France, Jorg Immendorf en Allemagne, Jean-Michel Basquiat aux Etats-Unis ou Francesco Clemente, peintre de la « Trans-avant-garde » italienne,  principal mouvement postmoderne.

Le courant  "appropriationniste"

Parallèlement à ce retour à la peinture, émerge un courant « appropriationniste » qui consiste à reproduire des œuvres existantes pour remettre en cause  les  notions d’originalité de l’art et d’artiste en tant qu’auteur.

Ex : Les œuvres de Sherrie Levine, principale artiste de cette tendance, au LACMA de Los Angeles.

Un art mondialisé

Ouverture des pays de l'Europe de l'Est

Redécouvre un patrimoine artistique inaccessible depuis longtemps et de nouveaux artistes émergent sur la scène internationale.

Ex : l’artiste russe Ilya KabakovLe Navire, 1986.

Remise en cause de l'hégémonie culturelle de l'art occidental

Intérêt pour des artistes venues d’autres horizons. En France, ce tournant est marqué par l’exposition Magiciens de la terre organisée au Centre Pompidou en 1989. Les artistes exposés étaient notamment Chéri Samba, peintre congolais, Frédéric Bruly Bouabré, artiste ivoirien, aux côtés d'artistes occidentaux.

Ex :  Oeuvres de Bruly Bouabré au MAMCO de Génève (Suisse).

Esthétique relationnelle

Ces artistes apportent des formes nouvelles telles que « l’esthétique relationnelle » selon le terme inventé par Nicolas Bourriaud dans un ouvrage paru en 1998. Ils organisent des moments de convivialité avec le public, par exemple Felix Gonzalez- Torres (artiste d'origine cubaine), qui offre des bonbons et des affiches qu’il crée, ou Rirkrit Tiravanija (artiste thaïlandais) qui cuisine des soupes.

Des images communes

A la fin des années 90, une nouvelle génération d’artistes vidéastes explore un répertoire d’images issues d’une culture désormais commune comme le cinéma ou la publicité. Ce sont par exemple Pierre Huyghe, Philippe Parreno, Dominique Gonzales-Foerster en France, Douglas GordonSteve Mc Queen au Royaume Uni.

Les années 2000 : La créativité à l'heure du numérique

La première décennie du XXIe siècle est propice au développement de l’art. Les politiques et les grands mécènes financent de nombreuses réalisations, et, parallèlement, des projets plus modestes, mais aussi plus indépendants voient le jour, notamment grâce aux outils de production et de diffusion que sont Internet et le numérique.

Photographie
Au début des années 2000, l’art contemporain est dominé par la photographie de grand format, notamment celle de l’école allemande, avec des photographes tels que Andreas Gursky qui mêle prise de vue classique et retouche numérique.

Ex : Œuvres de Gursky dans les collections du Moma de New York (USA).

Peinture
Une nouvelle génération de peintres qui s'inspirent de la photo, de la vidéo et du multimédia est rapidement reconnue grâce à de nombreuses expositions en France et à l’étranger. Ce sont par exemple Martin KippenbergerElizabeth Peyton ou encore Peter Doig.

Ex :  Exposition "Cher Peintre" au Centre Pompidou de Paris en 2002.

Art monumental
Des sculptures monumentales et de grandes installations sont réalisées grâce aux nouvelles technologies. Xavier Veilhan incarne le renouveau de la sculpture monumentale en France.

Ex : installation gigantesque d'Olafur Eliasson, The Weather Project, 2003 Tate Modern, Londres (Grande-Bretagne).

Ces grands projets reflètent la vitalité du marché de l’art et assurent le succès mondial de certains artistes, au premier rang desquels Jeff KoonsDamien HirstTakashi Murakami, ou encore Subodh Gupta et Maurizio Cattelan...

Structures alternatives et expérimentales
Des lieux d’exposition prospectifs, parmi lesquels, à Paris :
Béton Salon
La Fondation Kadist (Paris, San Francisco)
La galerie associative Castillo Corrales

Des curateurs indépendants qui interrogent la pratique de l'exposition :
Ex : Guillaume Desanges

Des publications et micro-éditions indépendantes telles que :
M19, structure éditoriale qui publie des ouvrages et des revues.
Le CNEAI (centre national d'art contemporain consacré à l'édition et à l'art imprimé) propose des micro-éditions ("éditions light").

Vanessa Morisset, Historienne de l'art - Centre Pompidou