Arts des jardins

Antiquité

MÉSOPOTAMIE

Jardins suspendus de Babylone, Ferdinand Knab (1886)
Domaine public, via Wikimedia Commons

 

Dès le début du troisième millénaire avant J.-C.
Gilgamesh, roi d’Uruk, se glorifie des vergers et des jardins dans les palais et les temples de sa cité.

Vers 2 000 avant J.-C.
Les premiers jardins publics sont attestés en Assyrie.

605-562 avant J.-C.
Les plus célèbres jardins de l’Antiquité demeurent ceux de Babylone aménagés par le roi Nabuchodonosor II et considérés comme l’une des Sept Merveilles du monde.

 

ÉGYPTE

Les jardins de Nebamon, fragment de peinture murale de la tombe de Nebamon, 1350 av. J.C.
British Museum, CC BY-NC-SA 4.0

 

 

Dès 2 600 av. J.-C.
Les jardins égyptiens sont connus grâce à des témoignages picturaux  découverts dans des tombes, ce sont des jardins d’utilité et d’agrément, de forme régulière, protégés du sable et des crues du Nil par de hauts murs et accueillant un bassin en leur centre. Les jardins aménagés sous les Ptolémées à Alexandrie auront une certaine influence sur les jardins romains.

 

 

 

 

GRÈCE

Dès le IVe s avant J.-C.
La présence de jardins y est attestée. Les Grecs ont inventé la notion de Bois sacré, lieu naturel non entretenu par l’homme, consacré à un dieu ou à un héros. Les Grecs ont utilisé les potentiels des paysages, développant ainsi le « genius loci », simples lieux ombragés destinés aux réunions et à l’enseignement (Académie de Platon et Lycée d’Aristote).

 

ROME

Fresque de la Maison du bracelet d'or, Pompéi
Crédits : Ismoon, CC BY-SA 4.0  via Wikimedia Commons

 

À l’origine, les jardins sont composés d’un potager et de vergers ainsi que le montre le traité de Marcus Porcius Cato, De agri cultura.

Au Ier s. avant J.-C.
Les écrits de Varro, Pline l’Ancien, Columelle ou Virgile décrivent des maisons de campagne, des « villas » où les jardins d’agrément sont sophistiqués, comme à Pompéi ou Herculanum, et à la villa Hadriana à Tivoli, que l’empereur Hadrien fait aménager entre 118 et 134 après J.-C.

 

 

PERSE

Vers 546 avant J.-C.
Les « paradis », jardins clos de Perse, réalisés sur le modèle du jardin du roi Cyrus à Pasargades étaient des jardins d’agrément réguliers composés de quatre parties organisées autour de canaux en forme de croix comme le montrent les miniatures persanes. Ils auront une influence sur les jardins du monde islamique tant en Asie, en Afrique et une partie de l’Europe (Sicile, Andalousie).

Exposition Les Jardins d'Orient Institut du monde arabe, 2016.

Moyen Âge

Vers le IVe s.

L’établissement des premières règles monastiques chrétiennes, est à l’origine d’une nouvelle vision du jardin, lieu de contemplation, de purification et de rédemption, l’hortus conclusus, dont un des plus beaux représentant est le jardin de l’abbaye bénédictine de Saint-Gall (Suisse) au IXe s.

La cueillette, Le Roman de la Rose, par Guillaume de Lorris et Jean de Meun
Source gallica.bnf.fr / BnF 

 

 

 

Lorsque le château perd peu à peu son caractère défensif, se développe l’hortus déliciarum, jardin paradisiaque, source des plaisirs terrestres comme à Hesdin (Pas-de-Calais) aménagé vers 1295 par Robert II d’Artois et détruit à l'époque moderne.

En Occident, le Roman de la Rose (1225-1278) aura une grande influence sur les jardins.

 

 

 

 

 

Jardins du Partal de L'Alhambra
Crédits : Tesla Delacroix, CC BY-SA 4.0, via Wikimedia Commons

 

 

Les premiers jardins islamiques en Europe sont aménagés au VIIIe s. au moment de la conquête arabe de l’Espagne et en Sicile vers 880. Les jardins des palais nasrides de l’Alhambra de Grenade sont aménagés vers 1238.

 

 

 

Renaissance

EN ITALIE

Aux XVe et XVIe siècle, on retient surtout les jardins réguliers en terrasses, souvent œuvres de grands architectes (Alberti, Bramante, Pirro Ligorio, Giulio Romano, Niccolò Tribolo, Vignole…), où les jeux d’eau et les grottes jouent un rôle important comme dans les jardins des villas médicéennes :

Médaillon des jardins de la Villa Castello par Giusto Utens vers 1595
Crédits : Giusto Utens, Ancien Museo di Firenze com'era - Domaine public via Wikimedia Commons

Villa Castello à Florence (1480),
Villa Madama à Rome (1516-1520),
Jardins Boboli au Palais Pitti à Florence (1550),
Villa di Pratolino (1568).

et les villégiatures de grands mécènes et ou de papes :

Villa d’Este à Tivoli (1550-1572),
Villa Lante à Bagnaia (1568),
Villa Farnèse à Caprarola (1565).

 

 

EN FRANCE

"Les Thuileries" plan par Jacques Androuet du Cerceau en 1579
Crédits : Musée Carnavalet, Histoire de Paris, CC0

Le jardin de la Renaissance s’ouvre sur le paysage et utilise les caractéristiques de celui-ci (le relief et l’eau). Jacques Androuet du Cerceau dans Les plus excellents bâtiments de France (1576-1579) publie des vues de jardins réalisés par de célèbres architectes de son époque :

Jardins du Château de Gaillon (Normandie) créés vers 1506,
Jardins du Château d'Anet (Centre) aménagés par Philibert de l’Orme vers 1548,
Jardins du Château de Vallery (Bourgogne) conçus par Pierre Lescot entre 1550 et 1562
Le premier jardin des Tuileries (Paris)  d'inspiration italienne conçus pour Catherine de Medecis vers 1564.

 

Grand Siècle

EN FRANCE


Alors que le contexte politique se stabilise sous Henri IV, les progrès techniques et scientifiques en matière de géométrie, d’optique, d’hydraulique, de topographie autorisent de grands changements dans la conception des jardins. L’utilisation de nouveaux instruments de mesure permettent des compositions plus complexes dans lesquelles la perspective et l’anamorphose jouent un rôle essentiel. Le « jardin à la française » est au centre d’un territoire organisé et une représentation du pouvoir.

Château de Balleroy par Louis Boudan (1717)

Château de Balleroy par Louis Boudan (1717)
Crédits : Bibliothèque nationale de France, Domaine public

 

Dans la première moitié du XVIIe siècle, la nouvelle classe des financiers se fait aménager des jardins en faisant appelle à l'architecte François Mansart qui dessine les bâtiments et les jardins :
Château de Balleroy vers 1630 par pour Jean de Choisy, conseiller du Louis XIII.
Château de Maisons vers 1642 pour René de Longueil, ministre des finances.

 

 

 

 

 

Plan général des jardins et parc du château de Meudon

Plan général des jardins et parc du château de Meudon
Crédits : Bibliothèque nationale de France, Domaine public

 

André Le Nôtre devient le jardinier emblématique de ce siècle :
Fouquet emploie André Le Nôtre à Vaux-le-Vicomte (1652-1661),
Louis XIV fait appel à lui notamment pour Versailles (1662 à 1693) et les Tuileries (1664-1672),
Ses autres prestigieux clients sont le Grand Condé à Chantilly (1662-1682), Colbert à Sceaux (1673-1691) ou Louvois à Meudon (1679-1681).

En + : Le plus célèbre jardinier paysagiste de l’époque Classique

 

 

 

 

EN EUROPE

Palace de Nymphenburg à Munich, Bernardo Bellotto (1761)
National Gallery of Art, Domaine public

Ce modèle français aura une grande diffusion dans toute l’Europe grâce aux traités d’art des jardins de Jacques Boyceau (1638), d’André Mollet (1652) ou de Dézallier d’Argenville (1709).
Il sera adopté par de nombreuses cours :
Pays-Bas (Het Loo)
Autriche (Schönbrunn)
Allemagne (Jardins du Château de Nymphenburg, Schwetzingen)
Russie (Jardins du Palais de Peterhof)
Espagne (La Granja)

 

XVIIIème siècle

EN ANGLETERRE

Le climat politique de l’Angleterre ouverte aux idées libérales, la redécouverte de l’Antiquité grâce à l’archéologie, et de l’Orient, l’influence de la peinture de paysage classique et la diffusion d’œuvres littéraires et poétiques (Joseph Addison, Alexander Pope, William Shenstone) invitent les grands propriétaires ruraux à paysager leurs terres en y installant des fabriques. Ces domaines deviennent également des lieux d’expérimentations agricoles sous l’influence des physiocrates.

Les paysagistes qui prônent un retour à la nature et à ses matériaux et créent ces jardins à l'anglaise, parcs pittoresques ou paysagers sont :
William Kent
Charles Bridgeman
Lancelot Brown dit Capability Brown
Humphrey Repton.

Nouveau plan du Palais, des Jardins, du Parc, des Plantations du Palais de Blenheim par Nicolas Vignaud, 1835
Crédits : British Library, domaine public, CCO.

Les principales réalisations sont les parcs de :
Parc de Studley Royal (1730)
Stowe (1735) conçu par Charles Bridgeman et où travaillèrent les grands jardiniers de l'époque : John Vanbrugh, William Kent et Capability Brown. En + : Lecture d'un jardin anglais, Stowe.
Jardins de Stourhead House conçu par Henry Hoare II (1735)
Rousham conçu par William Kent (1738)
Les jardins du Château Howard (1740)
Jardins du Palais de Blenheim (1764) conçu par John Vanbrugh puis modifié par Lancelot « Capability » Brown.

 

 

 

EN FRANCE

La colonne, fabrique du Désert de Retz à Chambourcy

La colonne, fabrique du Désert de Retz à Chambourcy
Elring, CC BY-SA 3.0, via Wikimedia Commons

 

Le changement s’opère en France dans les années 1770 sous l’influence des écrits de Jean-Jacques Rousseau et des tableaux d’Hubert Robert. Les concepteurs Jean-Marie Morel, René-Louis de Girardin, Thomas Blaikie composent des paysages pittoresques ou champêtres en utilisant les caractères du site en le modelant et le plantant de façon à créer des scènes :
Parc d'Ermenonville (1766-1770)
Désert de Retz (1774-1785)
Parc de Bagatelle (1779)
Parc de Méréville (1784-1789) - voir Château de Méréville.

XIXème siècle

Siècle de l'horticulture et du jardin paysager

Jardin d'hiver, Champs-Élysées, estampe de Provost.

Jardin d'hiver, Champs-Élysées, estampe de Provost.
Crédits : Bibliothèque nationale de France, domaine public.

Les compositions reflètent essentiellement une mise en scène du paysage, sans connotations littéraires ou artistiques : travail des masses végétales, alternance de parties boisées et de prairies, et choix de végétaux exotiques.


Le modèle paysager est adaptable aussi bien à la ville qu’à la campagne, aux petits et aux grands domaines comme le montre le traité de Gabriel Thouin en 1820. Le XIXe siècle voit de nombreux progrès en matière de biologie végétale, d'introduction et d'acclimatation de plantes venues de l’étranger (Alexander Von Humboldt et Aimé Bonpland), de multiplication et hybridation des végétaux, et le développement des serres et des jardins d’hiver chauffés (Joseph Paxton, Crystal Palace en 1851).

 

 

 

L’avènement du parc public

Vue générale du parc des Buttes-Chaumont, 19ème arrondissement, Paris
Crédits : CC0 Paris Musées / Musée Carnavalet

Parc Tiergarten à Berlin par Joseph Lenné en 1819 ;
Parc Birkenhead par Joseph Paxton à Liverpool en 1844 ;
Les Promenades de Paris commandées en 1852 par Napoléon III au préfet Haussmann et réalisées par Jean-Charles-Adolphe Alphand, Gabriel Davioud, Jean-Pierre Barillet-Deschamps, et Louis-Sulpice Varé entre 1860 et 1878 ;
Parc de la Tête d’Or à Lyon en 1856 par Denis et Eugène Bühler ;
Sefton Park à Liverpool par Édouard André entre 1867 et 1872 ;
Central Park à New York par Frederick Law Olmsted en 1873.

 

 

 

À la fin du siècle, on note un retour aux formes régulières dans les créations d’Henri et Achille Duchêne :
Parc du château de Voisins (1903-1906)
Jardins du Château de Bleinheim (1920)
Vaux-le-Vicomte (1923).

XXème siècle

Fonctionnalisme et éclectisme

Jardin Japonais Propriété d'Albert Kahn, Boulogne par Auguste Léon 1912
Crédits : Musée Albert Kahn, Collection Jardin de Boulogne

 

Compositions régulières et irrégulières sont associées pour créer des jardins mixtes : Jardins Albert Kahn à Boulogne-Billancourt, 1895-1910.

En Angleterre, le « wild garden » est mis à l’honneur par William Robinson et Gertrude Jekyll, dans cet esprit sont créés le Bois des Moutiers à Varengeville (vers 1900) et les jardins du Château de Sissinghurst (1930) dans le Kent.

 

 

 

 

Les jardins des années 20 et 30 subissent l’influence du cubisme - Gabriel Guevrekian à la villa Noailles à Hyères (1927) -, ou de l’art déco dans les créations d’André Véra et de Jean-Claude-Nicolas Forestier au jardin Stern, à Saint-Cloud (1927).

Parc André Citroën vue aérienne Est
Crédits : Copyleft (photographie sous Licence Art Libre) via http://www.gillesclement.com

 

Les années 1950 à 1970 voient l’apogée des espaces verts, il faut attendre le début des années 1980 pour que des réalisations d’importance voient le jour :
Parc du Sausset (1981-2005) en Seine-Saint-Denis par Michel Corajoud
Parc de la Villette (1982-1993) à Paris par Bernard Tschumi
Parc André Citroën (1985-1992) à Paris par Allain Provost et Gilles Clément qui invente la notion de jardin planétaire.

 

XXIème siècle

High Line Park, New-York
Crédits : Dansnguyen, CC0, via Wikimedia Commons

 

Les parcs et les jardins sont des enjeux de société, ils sont publics et créés pour un public urbain, ils témoignent des progrès technologiques notamment en matière d’écologie. Les réalisations reconnues sont la High line de New York, les parcs de Peter Latz dans la Ruhr, l’aménagement des bords du Rhône à Lyon, ou la réserve Costanera Sur à Buenos Aires.

 

 

Depuis 1992, le Festival International des Jardins de Chaumont est un laboratoire de la création contemporaine dans le domaine des jardins et de la création paysagère dans le monde.

En 2022, le Festival a fêté ses 30 ans sur le thème du jardin idéal. Quatre prix sont décernés : le Prix de la Création, le Prix Design et Idées novatrices, le Prix Palette et harmonie végétale et le Prix Jardin transposable.

 

Ressources en + :

Exposition Jardins en 2017 au Grand Palais
Histoire de l'art des jardins, Abbaye de Noirlac
Histoire des jardins

Crédit : Marie-Hélène Bénetière, Historienne des jardins